Voici le corolaire de « je n’ai pas été assigné ange à la naissance« , le corolaire de « je vous blesserai un jour » : vous me blesserez aussi.
Vous avez le droit de me trigger.
Je veux dire : ça arrivera forcément. Je suis cassée. Je suis trauma. J’ai une vie entière de vexations avec lesquelles je dois apprendre à fonctionner, et c’est loin d’être toujours simple. Parfois vous m’enverrez des fleurs et je le ressentirai comme une balle en plein cœur. Ce ne sera pas « rien ». J’aurais mal pour de vrai. Mais ça ne sera pas « grave » pour autant : Ça ne vous retirera pas votre humanité, il n’y aura pas une faute morale indélébile dans votre historique personnel parce que je vous signale que je suis blesséé par une de vos remarques ou un de vos gestes.
Je refuse que mon ressenti soit utilisé à charge contre vous, contre quiconque. Je peux avoir mal, être trigger, éprouver du cringe ou du malaise. Je peux l’exprimer, même véhément. Mais jusqu’à preuve du contraire, tant que je ne vous demande rien, c’est mon problème.
Plus tard peut-être, quand j’aurais appelé à l’aide et que vous choisirez de m’envoyer au diable, je pourrais vous en vouloir. Mais tant que j’en suis au stade de mes propres émotions, rien ne vous autorise à décider à ma place qui est responsable et quelle action punitive engager.
Si la douleur d’autrui nous affecte, j’aimerais qu’on mette plus d’énergie à la soigner qu’à culpabiliser des boucs émissaires
Oui, je sais, c’est plus difficile.
Mais c’est de ça, vraiment, dont nous avons besoin.
Il est inutile que vous vous flagelliez d’avoir par accident déclenché mes réflexes traumatiques. Mais si vous avez de l’énergie et du temps à m’accorder, alors m’écouter et m’aider à prendre du recul pour faire la différence entre un rappel d’une douleur passé et un signe de danger présent, m’apprendre à gérer mes émotions pour qu’elles ne me surchargent pas et que je puisse analyser seule les situations, me donner les outils pour ne pas être autant trigger la prochaine fois, me permettre petit à petit de me défaire de l’emprise des trauma : cela en revanche est inestimable.
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