Sept pêches 🍑

(Cette sĂ©rie de photo ainsi que les textes qui l’accompagnent on Ă©tĂ© intĂ©gralement postĂ© sur mon compte instagram avant d’ĂŞtre restranscrit sur mon blog.)

🍑 Gourmandise

Tare de l’enfance, qui te rend presque mignonne, toi et tes yeux qui brillent devant ton gâteau d’anniversaire.

On te « pardonne » si tu promets de faire attention à ta ligne, quand même.

Je me souviens de cette photo : je n’ai pas encore 11 ans, je suis allongée sur la plage avec ma sœur et ma cousine, et j’ai honte de mes fesses que je trouve trop grosses, qui ne le sont pourtant pas (pas du tout).

La honte je l’ai apprise, comme la méfiance vis-à-vis de ma morphologie, de mon appétit, de moi.

Je sais combien peu originale est mon histoire : Rapport déglingué à mon apparence et à la nourriture… qui entraine la prise de poids progressive qu’il fallait à tout prix éviter.

Dès 11 ans, je suis dans une spirale qui m’entraine de plus en plus loin de moi-même.

Je comprends vraiment en 2019 grâce au Ted talk « j’habite dans une grosse dame ».

Trop tard.

Ça fait 3 ans que je ne veux pas me voir. Je ne me prends plus en photo : je collecte des preuves matérielles de mes efforts, des images de moi en sueur.

Je mets le sport au cœur de ma vie, de mes études.

Et cependant, inexorablement, je grossis.

Et cependant, inexorablement, j’ai conscience de suivre une direction qui n’est pas la mienne, de ne faire que chercher une approbation qui ne vient jamais.

Je suis toujours trop grosse, trop lente, trop bigleuse, trop seule, trop gourmande.

J’ai un 2e électrochoc cet été 2020 en retournant donner mon sang, chose que je n’ai pas fait depuis un an de dépression : sur la balance du médecin, je suis passé de 90 à 63kg.

Je ne m’en étais pas rendue compte.

Pire, parce que j’avais arrêté le sport, que je mangeais n’importe comment, que je m’étais persuadé que mon poids ne pouvait aller que crescendo : j’étais sûre d’avoir grossi.

Je ne me regardais pas.

Je ne sais même plus faire : me regarder.

Aujourd’hui, il me faut tout réapprendre : à voir mon corps tel qu’il est, à ne plus craindre pour ce qu’il pourrait devenir, à m’alimenter sereinement… à retrouver la gourmandise que j’ai perdue en chemin.

🍑🍑 Paresse

Cela aussi, cela remonte Ă  loin.

Depuis toujours je le sais, c’est dans mes draps que je fuis la solitude qui m’accable.

Et je vous vois venir : non, je ne parle pas d’un besoin naturel de se ressourcer après l’agitation du monde. Je ne parle pas de l’envie (voir même du besoin), de se retrouver un peu seul·e face à soi-même. Car n’en déplaise aux adeptes du développement personnel, la solitude ce n’est pas cela (« cela », c’est au choix une retraite, du calme, le célibat, l’autonomie ou l’indépendance…).

La solitude, ce n’est pas seulement être seul·e, c’est savoir que nous n’aurions personne à qui parler quand bien même nous le voudrions.

C’est une souffrance qui a été et est toujours constitutive de la personne que je suis.

C’est une détresse qui, dans mon cas, découle de l’exclusion.

C’est la raison première de tout mon mal-être.

Quelque chose dont j’ai peur de ne jamais guérir.

Un poids que je suis parfois incapable de soulever, qui me cloue dans mon lit, qui m’empêche d’agir. Au plus bas, j’arrête de manger, j’arrête de bouger, j’arrête de créer, j’arrête même d’aller chez le docteur, j’arrête de vivre. J’attends un miracle.

Et je dors.

J’ai tendance à beaucoup dormir de toute façon, oui. Mais je le sais bien moi, je le constate, que les rares fois où j’ai prévu de voir des gens dans la journée, je me lève aux aurores. Je le sais bien que je suis capable, moi la marmotte, de me lever à 4h du mat pour avoir une discussion texto avec une personne à l’autre bout de la planète pour qui cet horaire est le plus pratique.

Je dors parce qu’il m’apparait que la vie éveillée n’a pas grand-chose à m’apporter.

Dans mes rĂŞves, au moins, je ne suis pas seule.

Fatiguée je le suis, mais ce n’est pas un état, c’est un symptôme.

🍑🍑🍑 Avarice

Je suis avare de ces efforts vains que j’ai déjà trop fournis.

On ne peut payer que ce que les autres ont mis en vente. Les autres ne pensent pas Ă  moi.

Je n’arrive pas à acheter des vêtements. En magasin, tout est taillé pour des corps sans hanches. J’ai l’habitude des pantalons qui trainent par terre, m’écrasent les cuisses, marquent ma taille. Ça irait mieux aujourd’hui, mais j’ai associé le shoping aux heures d’essayages insupportables desquels je ressortais sans rien à me mettre, ce ne sera jamais simple.

Je n’ai pas été dans un salon de coiffure depuis 4 ans. Je ne veux plus devoir expliquer comment j’enfonce mes ongles dans le cuir chevelu pour oblitérer le stress : oui j’ai des pellicules, des croutes, non, je n’ai pas de poux. J’ai trop de souvenir des gestes brusques pour remettre droite ma tête qui ne l’était jamais. Je suis trop de fois sortie insatisfaite… et honteuse d’avoir malgré tout répondu « oui » à la question « ça vous plait ? ».

Je dois me faire violence pour aller voir des médecins. J’ai trop l’habitude qu’iels me jugent avant de me soigner, qu’iels m’imposent des traitements auxquels je n’ai pas consenti, « c’est mieux pour toi » : redresses ta tête, redresses tes dents, dresses-toi.

Certains jours, je n’arrive pas non plus à faire mes courses. J’ai déjà parlé de mon rapport à la nourriture, déjà parlé aussi de la façon dont je m’arrête de vivre quand je vais mal.

Je dépense peu.

Je suis avare de tant de choses.

Avare surtout des espoirs que je place.

Je sais bien pourtant que j’arrive au bout de ce que je peux accomplir seule. J’ai besoin des autres pour avancer mais les autres sont si loin. Je n’ose pas les contacter, leur dire « viens, nous ne nous connaissons pas mais nous pourrions travailler ensemble, sur ce projet-ci ou sur celui-là, sur n’importe quoi pourvu que nous avancions ensemble ». J’ai tellement l’habitude de la solitude et du rejet. Il est plus facile de ne pas même essayer.

Alors je reste là, face à mon mur blanc, le corps nu devant la caméra, mes cheveux coupés de mes soins, la santé mentale en balance et le ventre plat.

Juste moi, mes papiers et mes pinceaux. Juste mes mots.

Si petit d’envergure, si minable d’ambition, si triste.

Seul·e, il n’y a pas de partage, et je ne le sais que trop bien.

Alors avare, oui, j’en conviens, mais pas par manque d’humanité. Par manque d’espérances.

🍑🍑🍑🍑 Luxure

Intéressant intermède.

Si je me dénude, est-ce que je me sexualise ?

La luxure n’est pas dans mes yeux. Elle est dans ceux des gens qui trouvaient mon short trop court alors que j’avais 11 ans. Elle est dans ceux des moralistes qui pensent parce que je suis queer que je suis forcément une perversion sexuelle, ce quand bien même, le sexe ne m’intéresse pas.

Le désir ne vient pas de moi.

Il ne m’est attribué que par convention.

Il n’est qu’une obstruction à la compréhension de moi-même. J’ai dû attendre le mois dernier pour trouver des mots qui décrivaient ce que je suis plus précisément que aroace (et j’ignore toujours dans quel contexte faire mention de ces mots là puisque personne ne les connait).

Il n’est qu’un élément à partir duquel je compose, disons : votre participation indirecte à ce projet.

La morale est d’abord une usine à normes. Elle fait une dichotomie facile entre le bien et le mal. Elle calque un jugement sans connaitre la personne.

Elle stigmatise ce que nous faisons et qui ne concerne pourtant que nous.

Elle stigmatise les symptômes d’un mal subit plutôt que le mal lui-même.

Elle stigmatise nos souffrances et les culs de sac dont nous sommes captifs, sans rien proposer pour nous sortir de lĂ .

Elle nous stigmatise a priori pour des choses qui n’ont peut-être rien à voir avec nous.

Mais la morale ne s’arrête pas à forger les normes, auquel cas nous n’aurions qu’à en créer d’autres, réfléchir, discuter.

Elle s’attaque aussi, dès lors que nous trouvons d’autres idéaux à défendre, à condamner les outils par lesquels nous pourrions les faire advenir.

Notre rage, nos rêves, nos fiertés (to be continued)

🍑🍑🍑🍑🍑 Colère

Faut-il ici mettre des trigger warning sur tous les sujets possibles ?

Faut-il d’abord parler des Ouighour qui subissent un génocide en Chine tandis qu’ici, loin de prendre position, notre président préfère cibler spécifiquement la population musulmane dans sa proposition de loi tandis que l’essentiel des médias instrumentalisent un meurtre pour s’en donner à cœur joie dans le racisme et l’islamophobie décomplexée ? Des violences policières dénoncées depuis des années mais contre lesquelles on ne fait rien ? Des migrants qui fuient la misère et à qui on refuse le droit d’asile sous des prétextes fallacieux ? Du refus acté de protéger les enfants intersexes des mutilations qu’iels subissent ? Du fait qu’on en vienne à avoir « le gouvernement nous préfère mort·es » comme mot d’ordre de l’existrans-inter ? Du président qui pour luter contre une pandémie mets nos vies sociales en pause tandis qu’il nous encourage à aller bosser comme si de rien était ? Du budget qui diminue pour la santé et augmente pour la police ? De l’allocation adulte handicapé qui est toujours sous le seuil de pauvreté ? Du CHU insalubre de la Guadeloupe qui n’a pas été remis à neuf depuis son incendie en 2018 ? Du scandale sanitaire de la chlordécone qui continue d’empoisonner les habitants de Martinique et de Guadeloupe ? Du fait que personne n’arrive à dire quelle est la différence entre un domtom et une colonie ? Des inégalités qui se creusent ?

La liste sera-t-elle jamais exhaustive ?

Je ne sais pas tout. Je n’ai ni la place, ni l’énergie, et même quand on aura fini de parler du pire, il restera les discriminations du quotidien, ces « blagues » qui n’en sont pas quand on a déjà le nez dans le sable, toutes ces petites vexations qui enfoncent chaque jour un peu plus le clou qu’on a planté dans le cœur.

Je voudrais parler de comment on se blesse, même entre nous, comment subir une oppression ne nous empêche pas d’en reproduire d’autres (voir même de reproduire la nôtre).

Mais pour aucun de ces problèmes, je n’ai de solution.

Je n’ai que mon art et mes mots.

Je n’ai que ma rage qui semble parfois tellement déplacée, elle qui se déchaine sur la goutte d’eau qui fait déborder le vase.

Pardonnez-moi, mes chèr·es : j’ai le droit d’être en colère.

🍑🍑🍑🍑🍑🍑 Envie

Je veux Ă©crire.

Je le dis en premier et en préambule car c’est probablement la chose que je peux dire le plus vrai à propos de moi.

Bien sûr, c’est égoïste.

Mes écrits sont politiques, oui, et j’aime à penser qu’ils feront peut-être une différence, si jamais j’arrive à les faire lire. Mais ce n’est pas pour ce bénéfice supposé que j’écris. J’écris pour moi, des histoires qui me ressemblent. J’écris parce que c’est la seule manière que j’ai trouvée d’être moi-même.

Cela n’a rien de dramatique.

Nous avons le droit de vouloir des choses pour nous.

Rien d’extraordinaire.

Je ne veux qu’écrire.

Ecrire pour l’écriture, et pour tout ce qu’il y a autour.

Pour que l’on m’entende quand je conseille des lectures, ou quand je me questionne sur le paysage éditorial et son manque (toujours, et malgré les bonnes volontés que je sais exister) de diversité.

Pour pouvoir parler de cette peur que je ne suis pas seule à connaitre : celle de n’être jamais à la hauteur, non parce que mes textes ne seraient pas assez bons, mais parce que malgré leurs qualités il y a toujours une ligne (straight) éditoriale à laquelle je crains de trop déroger, parce qu’il sera je suppose toujours plus facile pour un·e éditorice désirant déployer son catalogue de travailler avec des auteurices qui ne soient pas des autistes queer dépressifs et en colère.

Pour dire combien je suis reconnaissante des personnes qui voient mes défauts et cependant ne me lâchent pas la main.

Pour avoir l’opportunité d’aider les gens comme moi : qui sont là, stylo à la main, mais ne savent pas que faire de leurs productions une fois celle-ci achevées, qui ont peut-être abandonné avant de commencer (A quoi bon ?).

Pour animer des ateliers d’écriture, libérer des paroles qui s’automusellent. Pour éviter à mes adelphes aspirant·es auteurices de regarder comme moi le milieu de l’édition en se disant je… ne… sais… pas.

Ecrire aussi parce que c’est par ce biais que j’ai tout appris, que je me suis éveillé politiquement, que j’ai eu envie de me remettre en question.

Ecrire car en vérité, s’il y a une chose que je peux faire pour défendre mes (nos) droits, c’est bien cela.

🍑🍑🍑🍑🍑🍑🍑 Orgueil

Je veux ĂŞtre ce que je suis.

Je veux pouvoir être fièr·e de ce que je suis.

Et ce n’est pas facile : être fièr·e quand on a été exclu·e tout sa vie. Dire oui, on m’a critiqué pour cela, moqué·e pour cela, tenu·e à l’écart pour cela. Mais cela, c’est moi. Je ne renoncerais pas à qui je suis pour plaire à des bigots qui, quand je masque mon autisme ou tait ma queerness, me trouvent toujours inexplicablement bizarre, et me rejettent pareil.

Ce n’est pas facile : relever la tête quand on a passé sa vie à la baisser.

Des ami·es j’en ai si peu, et j’ai toujours peur de les perdre. J’ai toujours peine à envisager que l’on veuille de moi autrement que part hasard, parce que je suis là et qu’on me tolère en attendant de trouver mieux ailleurs.

Elle n’est pas toujours chatoyante ma fierté. Elle est entachée de mes angoisses.

Mes ailes sont en papier.

Oui mon égo est grand, mais j’ai dans le ventre un syndrome de l’imposteur de la même taille. Les deux s’affrontent dans mes entrailles dans un combat qui ne finit jamais, qui par vague me fait monter les larmes aux yeux tandis que je souris.

Je souris.

Elle est là mon orgueil, ma pride, ma fierté : dans la naïveté avec laquelle je me remets debout quand bien même je sais que je tomberais encore.

« Tendre l’autre joue », n’est-ce pas ?

Je les tendrai haut, mes joues. Le menton levé et le regard fier. Les couleurs sur ma peau. Les mots frémissants jusqu’au bout de mon stylo.

Je me revendiquerai jusqu’au bout.

Je serai fierté envie et colère aussi longtemps qu’on me jugera en fonction de mon allure (gourmandise), de ma productivité (paresse), de ma richesse (avarisse) ou de ma sexualité présumée (luxure).

Je réaffirmerai que je suis auteurice, autiste et queer, encore et encore, tant que mon droit à être ces trois choses à la fois ne sera pas garanti.

A parte : quand j'avais 11 ans

Il serait faux de dire que c’est au collège que j’ai commencĂ© Ă  ĂŞtre seule. Cela remonte a bien avant.

Mais au cours de cette sĂ©rie, j’ai parlĂ© deux fois de mes onze ans (dans gourmandise et dans luxure), et cela m’a fait rĂ©flĂ©chir.

A 11 ans, tout Ă©tait en germes, tout ce qui m’amène aujourd’hui Ă  cette sĂ©rie.

RĂ©trospective de ma solitude :

– Vers 4-5 ans, l’amie avec qui j’ai passĂ© toutes les rĂ©crĂ©ations depuis la petite section s’est trouvĂ©e qq1 d’autre et je finis la maternelle en compagnie des dames de la cantine (c’est Ă  ce moment que ma mère se demande pour la 1ere fois si je suis autiste, mais conclu que non).

– En CP, nouvelle Ă©cole, l’amie (qui dĂ©mĂ©nage l’annĂ©e d’après) que j’ai ne mange pas Ă  la cantine et je reste seule tous les jours entre midi et 2h

– En CE1-CE2, je me fais une nouvelle amie, qui dĂ©mĂ©nage Ă  son tour, alors en CM1, je passe beaucoup de temps toute seule avant de me faire accepter dans un groupe.

– En CM2, je change d’Ă©cole pour une plus petite, qui vient d’ouvrir Ă  2pas de chez moi. Je suis dans une classe triple… et mes amies sont les amies de ma soeur (dans la classe double CP-CE1).

– Alors la 6e, c’est surtout le moment oĂą le dĂ©calage entre moi et les autres devient tangible, oĂą il y a rupture entre mes centre d’intĂ©rĂŞt et ceux des autres. Au collège, les filles commencent Ă  parler garçons.

Pas moi. Pas du tout.

En 6e je me fais pour un an une amie qui s’amuse Ă  me frapper. Et puis plus rien.

Je savais déjà être seule.

Je découvre la solitude (et elle me poursuivra longtemps)

Toute la suite est en prémisse :
Il y a mon poids prĂ©sumĂ©, mais aussi mes seins qui commencent Ă  pousser, qui font que j’arrĂŞte de me regarder (dysphorie bjr).

Il y a les remarques que je ne comprends pas (pk il est trop court, mon short ?)

Il y a le regard des adultes qui change (Plus rien n’est inocent. Tout est « l’âge bĂŞte »).

Il y a les autres de ma classe qui disent pour se moquer que je suis gouine ou autiste. Dans leurs bouches ce sont des insultes. J’essaie de me convaincre que je ne suis pas cela. (Que donc, je ne suis pas… moi

11 ans, c’est l’âge oĂą je me distancie de moi.

11 ans, c’est aussi l’âge oĂą j’ai entamĂ© l’Ă©criture de mon premier roman.
Tout Ă©tait lĂ .

Conclusion : 7 pĂŞches

La morale (chrĂ©tienne) telle quelle est dĂ©finie Ă©choue Ă  dire ce qui est vraiment prĂ©judiciable. Il n’est pas question de ne pas voler, de ne pas tuer, de ne pas violer, de ne pas infliger Ă  l’autre des violences physiques ou psychiques. En vĂ©ritĂ©, elle ne rĂ©flĂ©chit pas Ă  nous dans un contexte, nous avec les autres, les autres avec lesquels il faut apprendre Ă  communiquer. Elle nous imagine comme des ĂŞtres quasi immateriels et dĂ©connectĂ© de tout et dit « tel trait de caractère est intrinsèquement mauvais. Si tu es ainsi : change-toi. »

Et se faisant : elle construit une norme.

Et se faisant : elle exclut… et oublie, et ostracise quiconque sort de cette norme.

Elle n’envisage pas que nous puissions « être ainsi » parce que nous avons Ă©tĂ© façonné·es de cette façon, parce que nous sommes perçu·es de cette façon, parce que nous n’avons d’autre choix que d’ĂŞtre de cette façon. Elle ne prend pas en compte les discriminations, le fait que face Ă  l’injustice, il est naturel de ressentir de la colère, positif d’avoir des rĂŞves, essentiel d’apprendre Ă  s’aimer pour ce que nous sommes (aussi difficile que cela soit).

La morale est figée.

La vie est fluide.

Cela ne peut fonctionner.

Mais au delĂ  de cette dĂ©connection du rĂ©el, je n’aime pas la morale car elle est uniquement nĂ©gative.

Elle dit seulement « ne faite pas cela ».

Et jamais « Voilà ce que vous devriez faire ».

Elle ne dit pas : « soyez Ă  l’Ă©coute de vos paires et de vous-mĂŞme, prenez garde en toute chose Ă  receuillir leur consentement Ă©clairĂ©, posez vous toujours des questions, aimez et doutez avec la mĂŞme intensitĂ©… »

Elle dit : « ceci est un péché. Ne mangez pas ce fruit ».


Je veux manger le fruit.

Croquer dans cette pĂŞche.

Dans sept pĂŞches, mĂŞme, s’il le faut.

Être à la fois gourmand·e, au repos, économe, queer, en colère, ambitieuse et fièr·e.

Eva.

Je porte bien mon nom.

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