Nimona est un film d’animation adapté d’une bande dessinée éponyme crée il y a plus de dix ans.
C’est aussi le premier film auquel je dédie un article sur ce site, moi qui chronique d’ordinaire plutôt des livres. Mais j’ai d’excellentes raisons pour cela. Il n’y en a pas beaucoup, des films pour enfants qui me transpercent et le cœur et l’esprit. Bien sûr, comme beaucoup, j’ai pleuré devant Coco ou Oceam. Mais l’émotion était humaine, très largement partagée. Il n’y avait pas ce regard porté sur nous, sur nos vécus si souvent passés sous silence. Il n’y avait pas cette chaleur en moi.
Nimona est un message d’amour au milieu des torrents de haine du harcèlement intracommunautaire. Et nous avions désespérément besoin de cet amour là.
Nimona est un film pour mes sœurs trans fucking cancelled.
Je n’ai presque rien envie d’ajouter de plus. Je voudrais qu’il parle de lui-même. La métaphore est si transparente, pour ceusses d’entre nous qui ont vécu ce que le film montre.
Allez donc regarder Nimona.
Regardez-le en ayant en tête que c’est l’histoire d’une meuf trans qui se fait cancel, comme elles sont si nombreuses à l’être en réalité.
Et puis quand vous l’aurez vu, et que vous n’aurez pas compris pourquoi j’affirme ce que j’affirme et que vous voudrez que je vous explique ce qui ne devrait pas avoir besoin de l’être, revenez. Je vous dirai ce à côté de quoi vous êtes passéés.
Ou bien quand vous l’aurez vu, et que vous aurez très bien vu ce que j’ai vu aussi, et que vous aurez envie d’une preuve que vous n’êtes pas seull, qu’on a bien vu la même chose, revenez. Nous aimerons Nimona ensemble.
Ce film…
Au début du film, on rencontre Ballister Boldheart (Ball pour les intimes) : le premier roturier à avoir été admis à l’institut des chevaliers défenseurs du royaume. Mais, lui qui est moins riche et moins blanc que les autres ne fait pas l’unanimité (il est aussi gay, mais il ne subit pas de discrimination lié à cela). Le jour où il devait recevoir officiellement son titre, il est piégé : l’épée qu’on lui remet explose entre ses mains, tuant la reine. Par réflexe, son amant Ambrosius Goldenloin (blondinet descendant direct de la grande Gloreth qui a fondé l’ordre des chevaliers) lui tranche le bras. Mutilé et considéré comme coupable par le royaume entier, il est contraint de prendre la fuite.
Déterminé à prouver son innocence, il fait la rencontre de Nimona : une métamorphe qui veut en découdre. Elle qui est perçue comme un monstre sait depuis bien longtemps que le système du royaume est pourri jusqu’à la moelle. Ball cependant mettra un peu de temps à l’admettre.
NIMONA : Écoutez patron, vous avez été trahi par une personne de confiance. Je sais que c’est un sale coup. Mais on a gagné ! On a trouvé la preuve de votre innocence et une fois que la vidéo sera diffusée…
BALL : On ne va pas diffuser la vidéo.
NIMONA : Quoi !? Tout le monde doit connaitre la vérité ! Le système est malhonnête. Faut qu’on ferme l’institut. […] Je ne me tairai pas, l’affaire est trop grave.
BALL : Cette vidéo va briser la confiance que les gens ont dans l’institut.
NIMONA : Duh ? Vous croyez ?
BALL : Je sais pas pourquoi elle a voulu me piéger comme ça, mais c’est pas l’institut le vrai problème. C’est la directrice.
Je suppose que si on voit le film uniquement du point de vue de Ball, l’histoire peut être assez classique : un personnage faisant partie d’une minorité (les pauvres tenus à l’écart des sphères de pouvoir symbolique tel que l’ordre des chevaliers) apprend au contact d’un deuxième personnage appartenant à une autre minorité (les monstres tenus à l’écart du royaume) l’importance de remettre en question ses a priori négatifs et de soutenir ses amiis.
Oui, sauf que.
Nimona n’est pas « un personnage appartement à une autre minorité ».
Nimona est Nimona.
Elle est le seul « monstre » que la ville ait jamais connu.
Le royaume n’est pas en guerre contre « des monstres » (qu’iels verraient et combattraient quotidiennement), mais contre un seul, depuis mille ans : Nimona.
Il y a même un parchemin présent dans la salle des archives de l’institut depuis un millénaire pour en attester : c’est Nimona le monstre que Gloreth a du défaire.
Or ce n’est pas du tout la même histoire quand on est haï en raison d’a priori sur ce que l’on est (membre d’une minorité auprès de laquelle on peut espérer trouver refuge) versus quand les gens nous haïssent nous personnellement.
Quand Nimona va à la rencontre de Ball au tout début du film, ce n’est pas parce qu’ils partagent une « identité » commune. Presque au contraire : Ball a été formé par l’institut, il fait parti de ceux qui ont pour mission de la pourchasser. La seule chose qu’ils ont en commun, c’est que les deux sont les cibles de mensonges, les deux sont rejetés par la communauté même qu’iels s’étaient choisie.
BALL : Pourquoi tu as décidé de m’aider ?
NIMONA : Parce que je m’ennuie… et parce que tout le monde vous déteste vous aussi.
Le film parle de la manière dont des mensonges peuvent servir à diaboliser et à exclure certaines personnes, quand bien même elles n’ont rien fait. Et bien sur, cela peut arriver pour différentes raisons. Par exemple : cela arrive à Ball en raison de sa classe sociale.
Mais il y a quelque chose de vraiment spécifique dans l’histoire de Nimona, qui fait qu’à mes yeux elle ne peut pas être autre chose qu’une meuf trans.
Cela tient à ce que l’on nous montre de son passé : au commencement, elle était animale. On la voit sous forme de poisson, ou de daim, tenter de s’intégrer avec des animaux de divers espèces, toujours sans aucun succès. Et puis un jour, elle se rapproche d’un puits où une petite fille (Gloreth enfant) s’amuse à jeter des cailloux. Émerveillée, elle prend l’apparence d’une fillette du même âge (apparence qui, légèrement grandie, restera son apparence principale ensuite, celle à laquelle elle revient après ses multiples métamorphoses) et arrive pour la première fois à créer du lien avec un autre être.
Nimona et Gloreth deviennent très vite amies. D’abord surprise, Gloreth accepte la nature métamorphe de Nimona.
Mais un jour, alors que Nimona a pris la forme d’un ours, des villageois surprennent les jeux des deux enfants et arrachent Gloreth des griffes de la « bête ».
Pour les rassurer, Nimona reprend alors son apparence humaine, mais cela ne fait qu’empirer les choses. Car s’il y a une chose de pire qu’une bête : c’est une bête qui peut se cacher sous les traits d’une innocente fille.
Un ami m’a dit (je paraphrase) : « Je comprends pourquoi tu dis que le film parle d’être cancel, mais d’autres minorités peuvent l’être aussi, cela n’arrive malheureusement pas uniquement aux femmes trans. Pour moi c’est bizarre de dire que ça parle de transmisogynie alors que ça n’aborde pas ses dynamiques, à savoir la manière dont les femmes trans sont renvoyées à leur masculinités assignées et menaçantes. Or là, puisqu’il n’y a aucune vraie menace à laquelle associer à tort Nimona, c’est pas cohérent ».
Sur le moment, j’ai juste répondu que ça ne me semblait pas grave : le film se concentrait sur les conséquences plutôt que sur les causes.
Mais en vérité, plus j’y pense plus je me dis que Nimona est bel et bien associée à une menace, celle des bêtes sauvages (et féroces, de vrais danger pour les paysans de l’époque de Gloreth) en lesquelles elle se transforme : l’ours, le loup, le cheval qui cabre, le gorille, le rhinocéros, le dragon, etc. Or elle était tout cela bien avant d’être une fille, et c’est pour cela que les villageois la craignent autant.
Ce que Gloreth (et ce sera répété par la directrice de l’institut plus tard) lui dit pour la chasser, c’est très précisément :
GLORETH : Retourne moisir dans les ténèbres dont tu es issue.
Ce que Gloreth lui dit, c’est très précisément « C’est auprès de moi que tu t’étais pour la première fois sentie acceptée et aimée, toi qui ne l’avais jamais été auparavant, mais j’ai peur des instincts de bête que tu as du garder de ta socialisation masculine, toi qui ne cache pas que tu es trans tes pouvoirs de métamorphe. Alors je te renvoie à cette assignation ce rôle de bête dans lequel tu ne t’es jamais sentie à ta place, et je te renie l’accès à la famille choisie que tu avais trouvée à mes côtés ».
Nimona est une femme trans cancelled. I’ll die on that hill.
Et même plus que ça : elle est une meuf trans qui n’a pas honte de ce qu’elle est, et c’est pour cela qu’on l’a cancelled.
BALL : Quand tu te métamorphose, tu ressens quoi ? Ca fait mal ? […]NIMONA : En toute franchise, je me sens moins bien quand je ne le fais pas. C’est comme si mon corps entier me démangeait. Vous voyez ce qu’on ressent juste avant d’éternuer ? Ca ressemble un peu à ça. Et ensuite je me métamorphose, et je me sens libre.
BALL : Et si jamais tu te retenais ? Si tu ne te métamorphosais pas ?
NIMONA : Je mourrais..
BALL : Grande Gloreth ! C’est terrible !!
NIMONA : C’est vous ce que vous êtes naïfs ! Nan c’est pas vrai, ce serait pas la mort. Mais ce serait pas vraiment une vie non plus.
Une fois ces prémisses posées : il y a absolument tout dans ce film. Et ce, à commencer par le tout début : la manière dont Gloreth, à qui Nimona n’a jamais fait le moindre mal, réécrit l’histoire toute seule, encouragée par un entourage qui entretien ses fantasmes négatifs et va jusqu’à créer pour elle tout un royaume « safe » (aka dont « le monstre » est exclu) qui a pour mantra :
DIRECTRICE (à ses futurs chevaliers alignées devant elle en deux rangées militaires) : Et respectez toujours la parole de Gloreth. »
Ce mantra, c’est exactement le « Et respectez toujours la parole des victimes » des féministes/queer.
Car au fond c’est cela qu’est Gloreth : une gamine apeurée (ou une femme traumatisée, puisque dans le film la jeunesse des personnages représente beaucoup leur degré de fragilité. Du moins c’est ainsi que j’explique que Nimona ait toujours les traits d’une ado, elle qui vit depuis plus de mille ans) qui se laisse dire qu’elle est en danger parce qu’elle voit en Nimona des échos d’autres choses…
… une gamine, pardon : une femme puissante, que l’on glorifie, que l’on statufie, dont on « respecte la parole » bien après qu’elle ait cessé de la porter. L’institut agit en son nom, c’est à dire : ostracise et harcèle en son nom, érige des barrières en son nom, tire sur son propre camp en son nom…
Et puis le reste :
…il y a la manière dont personne ne sait exactement ce qui est reproché à Nimona (contrairement à Ball où il y a des accusations précises bien que mensongères le concernant, ce qui laisse une possibilité de se défendre. Les gens lui reprochent d’avoir tué la reine avec un rayon vert sorti de son épée)…
… la manière dont personne ne pose la moindre question…
BALL : Il a pas voulu me couper le bras, il a voulu écarter une menace. C’est l’entrainement qu’on a recu.
NIMONA : Waaah… ! Il vous ont bien lavé le cerveau hein ? Vous devriez remettre en question tout ce qui vous entoure. La volonté de Gloreth, l’institut, la muraille. C’est quoi leur raison d’être ?
BALL : La protection du royaume.
NIMONA : Contre les méchants chevaliers comme toi… ou contre les monstres. Comme moi ?
… la manière dont la proximité avec Nimona est en soit source d’opprobe…
BALL : Golden Boy t’as vue te métamorphoser ?
NIMONA : Sérieusement ? Il vous a coupé le bras et ça vous embête qu’il vous voit avec moi ??
… la manière dont on joue de l’affect pour faire pression Ballister pour qu’il trahisse Nimona (seule manière pour lui de retrouver son statut, son amant, tout)…
AMBROSIUS : C’est ton acolyte qui t’as manipulé.
BALL : Quoi ?
AMBROSIUS : Tout ça, c’était son plan diabolique. Elle a tout prévu. C’est une créature du mal.
BALL : Une créature du mal ? Non, tu as tort. On a tous tort sur toute la ligne.
AMBROSIUS : Tu crois qu’on a tous tort ? [Mais] c’était elle Ball. C’est le monstre que Gloreth a vaincu. […] On peut vaincre ce monstre. Les choses peuvent redevenir comme avant.
… la manière dont cela détruit des relations…
BALL : Est-ce que j’ai jamais vraiment compté pour toi ? Ou est-ce que tout n’était qu’un mensonge ?
AMBROSIUS : Un mensonge ? Tu me fais la morale alors que tu es complice d’un monstre ?
BALL : La traite pas de monstre. Elle est brillante, attentionnée, et pas dépourvue d’élégance… Et elle est toujours là pour m’aider. Contrairement à toi. […]
AMBROSIUS : Et maintenant ? Est-ce que tu compte me tuer moi aussi ?
BALL : Tu pense que je ferais ça ! Hein !? … Tu ne me connais pas du tout.
…La manière dont, in fine, l’obsession du royaume pour Nimona les mènent à tirer contre leur propre camp.
AMBROSIUS : Madame, quelqu’un tourne le canon vers l’intérieur du royaume !
LA DIRECTRICE : Oui je sais. C’est moi qui ai donné l’ordre.
AMBROSIUS : Mais ! S’il tire ça va détruire la moitié de la ville ! Vous allez tuer des milliers de gens !
LA DIRECTRICE : Et je vais tuer le monstre !
Bien sûr, certains de ces aspects s’appliquent aussi à des contextes moins spécifiques de discrimination des minorités. Les facho aussi inventent des menaces imaginaires, mentent allégrement pour maintenir leur vision pétée du monde, et finissent par jouer contre leur camp (comme ces américains ultra précaires qui préfèrent littéralement crever de faim que de soutenir le projet « Obama care » dont bénéficieraient aussi des populations racisées).
Il reste (pour ceusses qui ne veulent pas voir) une possibilité de ne lire dans l’histoire de Nimona qu’une fable gentille sur l’acceptation et l’importance de l’amitié.
Mais encore une fois : c’est oublier qui est Gloreth (pas un faf mais une petite fille à défendre), qui est Nimona (pas un monstre parmi d’autres mais une enfant isolée que les gens voient comme une bête sauvage qui se masque pour « s’infiltrer » auprès des filles innocentes comme Gloreth), quel est le royaume à défendre (pas un patriarcat mais un lieu « en sécurité » LGBT-friendly crée par une femme, dirigés par des femmes, et défendu par des chevaliers gays. Un lieu toujours fort élitiste, et aussi raciste quand on prête l’œil. Mais déso les milieux queer IRL sont pas exempts de ça).
Et puis la douleur. La douleur spécifique d’être rejeté par ceusses que l’on avait choisi, ceusses auprès de qui on pensait avoir enfin trouvé notre place après une vie entière à la chercher.
Tout ce que ça révèle, c’est à quel point les méthodes des cancel kids ne sont rien d’autre que de la répression (celle-là même que l’on dénonce chaque fois qu’on écrit ACAB sur un mur)
Et puis donc : la souffrance.
Cette souffrance là, celle du doute dans le regard des gens qu’on aime, des gens avec qui on avait pourtant pu se montrer entièrement nous-même et qui nous avaient aimé pour nous-même, mais qui, tout compte fait, changent de regard sur nous.
Nimona est assez peu sensible à la douleur. On nous le montre plus tôt dans le film, au moment où elle se prend une flèche dans la cuisse et où Ball, inquiet, se précipite pour l’aider.
BALL : D’habitude tout le monde hurle à ce moment là.
NIMONA : J’suis pas tout le le monde.
BALL : Ca te fait pas mal ?
NIMONA : Bah… Si. Mais j’ai connu pire.
BALL : Qu’est-ce que tu ressens ?
NIMONA : Bah j’ai encore mal. Comme si j’avais un trou dans la jambe.
Ce n’est pas qu’elle ne ressent pas la douleur. C’est qu’elle a toujours été seule face à elle. Alors elle a appris à la masquer, à paraitre forte, drôle, indépendante. Hyper-indépendante. Comme le sont seulement les personnes traumatisées.
Mais le masque n’efface pas ce qui gronde en dessous.
Il y a cette masse noire de colère, de rage, et de désespoir. Toute prête à la consommer toute entière.
Je ne peux pas ne pas voir.
Pas quand j’ai le corps collé contre celui de la femme que j’aime, celle que je vois chaque jour lutter contre ce même gouffre depuis maintenant sept mois. Je la connais assez pour reconnaitre le miroir que le film nous tend. D’ailleurs, c’est elle qui a voulu que l’on le regarde ensemble. Elle savait ce qui j’y verrais.
Et moi, je me sens tellement impuissantt. Tellement en colère.
J’ai envie d’arracher les yeux des cancel kid qui ont aimé ce film, qui se sont vus dans les victimes parce qu’ils ont un pauvre badge arc-en-ciel et qu’on les a mégenré à la boulangerie l’autre samedi, alors qu’ils sont les bourreaux. Je suis méchante et je m’en fous. Iels n’avaient pas le droit d’aimer ce film.
Et puis Nimona enténébrée marche sur le royaume.
Elle abime quelques bâtiment au passage et les habitants fuient et les chevaliers lui tirent dessus de toutes les manières possibles.
Mais elle n’attaque pas. Elle n’est pas là pour ça.
Elle chancelle et titube jusqu’à la statue géante de celle au nom de qui on la haït, prête à s’empaler le cœur sur l’épée de marbre pointée sur elle.
Elle lâche prise. C’est cela que fait le harcèlement (tout « féminste » soit-il) : même quand on sait qu’on a rien fait de mal, même quand les harceleurs ne se donne pas la peine d’avoir un semblant d’accusation concrète pour justifier leur haine, on se dit hey, si tous ces gens pensent le monde serait mieux sans moi, ma foi…
NIMONA : Je ne sais pas ce qui me fait le plus peur : Le fait que tous les habitants de ce royaume rêvent de me plonger leur épée en plein cœur, ou le fait que parfois, j’ai envie de les laisser faire.
Je ne sais pas à quel moment du film je sors de l’analyse. C’est le moment de la vraie vie où je l’entends pleurer et que je me sers plus fort contre elle. On est quatre autour d’elle, là sur le canapé. On est plus encore en réalité. Tout un polycule qui ne la lâchera pas. Jamais.
Il faut bien ça.
Il faudrait tellement plus que ça.
A l’écran la main de Ball interrompt le geste de Nimona. Juste une main. Posée sur son cœur.
Parce que c’est cela que ça prend.
Dans la vraie vie les meufs trans qui ne sont pas bien entourée face aux callouts viennent grossir la liste des noms le TDoR.
Après ça, le film va jusqu’au bout de son propos.
Je veux dire : on aurait pu avoir un happy end au moment où Nimona décide de ne pas se suicider. Mais on aurait pas vu comment le royaume réagit à sa mort.
Et d’une certaine manière : je voulais voir ça. La violence de ça : les gens qui l’ont pourchassée tout sa vie mais qui viennent mettre une gerbe sur son autel maintenant qu’elle n’est plus là (y’a même le gars qui depuis le début est le plus activement une ordure avec tous les protagonistes qui vient déposer un bouquet). La violence des cancels kids qui viennent verser leur larmichette le TDoR, alors qu’iels ont activement contribué à tuer une partie des gens dont iels viennent lire les noms.
C’est plus facile d’honorer les mortes.
Les mortes ne te disent pas d’aller te faire foutre avec ta performativité à la con.
Et en même temps : j’avais pas envie qu’elle meurre. Vraiment pas. Surtout pas pour sauver des abrutis qui la méritent pas (en même temps, oui, le monde, et le monde queer en particulier, a pas conscience de tout ce qu’il doit aux meufs trans, surtout celles qu’il a personnellement diabolisées).
Alors elle ne meurt pas.
Ball ouvre la porte et soudain elle est là à nouveau. Ressuscitée.
En vrai j’ai conscience que c’est facile : tuer ton personnage pour dire ce que t’as a dire et le ramener en mode deus ex machina parce qu’il le faut.
Mais je m’en fiche.
J’crois que j’aurais fait exactement pareil.
Ce film, il est pour les Nimona et les êtres humains décents qui les empêchent de se foutre en l’air en posant leurs mains sur leurs cœurs.
Je sais pas combien de gens s’en rendront compte. Je sais même pas si les réalisateurs et scénaristes s’en sont rendu compte. Peu importe.
Y’a des gens qui trouvent que c’est un film queer parce que Ball est gay et que ça parle d’acceptation. En vérité c’est un film queer parce que certains queeros devraient crever de honte en le regardant.
(Ouais, je suis toujours pas sympa, déso pas déso, I guess)
Bref ce film <3 <3 <3
J’ai été en PLS pendant toute une nuit après l’avoir vu, et j’ai hyper focus toute la nuit suivante pour écrire cet article (il est 6h30 du matin à l’heure où j’écris ces mots, et j’ai toujours pas dormi).
Mais je me dis peut-être, peut-être, les enfants qui vont grandir avec ce film, même s’ils n’en comprennent pas les enjeux, seront un peu moins enclins que leurs ainéés pour détruire la vie de leurs pairs.
Dernier message pour les Nimona qui passeraient par là : le monde est meilleur parce que vous êtes dedans. N’en doutez pas.
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